Des romans jeunesse sur Haïti, perles des Antilles

Publié le par L'Aquoiboniste atrabilaire

Des romans jeunesse sur Haïti, perles des Antilles

Moins que rien, Yves-Marie Clément Talents hauts, 2018

 

À Haïti pour fuir la misère Éliette a dû quitter sa famille et son village pour chercher une vie meilleure à la ville. Mais c'est une fille, une "lapourça", qui est "là pour ça", juste obéir à des maîtres, qui la rudoient et la traitent comme une esclave. Sa seule joie est de jouer au foot avec ses copains avec un ballon de chiffons. Un jour son méchant maître la force à lui acheter un tableau ancien... Éliette le trouve bien laid, ce portrait d'homme en costume, qu'elle doit garder près de son lit dans sa case misérable. Mais voilà que la nuit la figure de la peinture s'anime... Éliette suivra les conseils de l'ancien esclave, né libre en Afrique 1770, qui s'est libéré de ses chaînes, et s'enfuira à son tour. Un court roman fantastique et réaliste à la fois , qui fait ressentir de l'intérieur la vie difficile des enfants dans le pays le plus pauvre du monde. Une ode à la liberté, au message allégé par l'emploi savoureux des mots créoles et toute la saveur et le charme des Tropiques.


 

L’Ange gardien, loin du monde comme il est… / Didier et Jessica Reuss-Nliba

 

 

Deux frères jumeaux orphelins et misérable de 11 ans vivent à Haïti. Abandonnés, forcés de survivre comme ils le peuvent dans la ville, ils dérobent un jour une belle somme d'argent. Leur histoire, qui finit bien, est racontée par l'un des frères, devenu adulte. C'est plus une leçon de morale qu'un roman, pétrie de religion : l’ «ange gardien » du titre évoque vraiment un « esprit saint », et il est fait tout de suite référence aux Dix commandements pour évoquer l’acte fondateur de l’histoire. Il s’agit pourtant d’une mauvaise action, le vol d’une liasse de billets dérobé lors d'une fête d'anniversaire à laquelle ils étaient invités, dans le quartier riche de la ville. Repentants, les frères décident que cet argent servira à leur éducation, et avaient-ils d'autre choix, réduits à la mendicité.

Durant leur parcours, que d’ « épreuves à subir avec l’aide de Dieu » devront-ils vivre ! Surtout pour le lecteur, bien moins réjoui par les aventures si édifiantes et bien-pensantes (même si voler c’est pas bien) des deux gamins, que par celles, hum, de Tom Sawyer et Huckleberry Finn, par exemple ?

La description du pays est par trop abstraite, manque de chaleur, de couleurs. Le pavillon de la valeur du travail est hissé très ostensiblement, les deux frères surmontent leur situation par l’envie de travailler et d’étudier, devenir mécanicien pour l’un, instituteur pour l’autre. Sans que jamais on ne s’identifie aux héros. Le roman aurait pu tourner au livre de survie, charmer par la débrouillardise des héros, mais rien de tout ça ne se passe. A la place, on a des tartines de leçons de morale un peu écoeurantes, à l’image de ce « copieux petit-déjeûner avec chicorée et grosses tartines beurrées de margarine », sans doute un adjuvant à la rédemption…

Un roman d'apprentissage avec des qualités, tout d'abord celle de dénoncer le travail des enfants, et de belles envolées sur le métier d’instituteur (et de mécanicien tout autant !), sur le libre arbitre, la chance qui se mérite, etc.

Mais elle tombe un peu des mains, cette leçon de morale didactique et scolaire… Des répétitions, un usage abusif du passé simple, une pluie de « îmes » et de «ûmes » qui certes a le mérite d’enseigner l’emploi de ce temps et son orthographe aux enfants, mais ne fait qu’accentuer le côté un peu vieillot du style,celui d’une rédaction d’écolier d’un autre âge, sans modernité aucune.

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