Les bonnes blagues prises de choux de Jean-Christophe Royer

Publié le par L'Aquoiboniste atrabilaire

" - C'est simple, tu prends une photo du monde agricole, n'importe laquelle, et tu y ajoutes des dialogues... Des trucs marrants un peu décalés... Tu vois.  

- La vache... Ca a l'air chiant, ton truc..."

(légendes de la photo de 4e de couv. de l'ouvrage, dialogue de deux mecs en bleu de travail et bottes de caoutchouc, discutant devant un champ de blé ou de maïs, du vert à perte de vue).

Un petit bouquin au format à l'italienne et qui vous brandit un chou vert fluo en pleine gueule de couv., ce n'est pas si fréquent. Quel est cet ovni, un bouquin de cuisine sur les potées ou de jardinage sur l'air de "savez-vous planter les choux ?". Inclassable et difficile à cerner au premier abord, il s'agit plus d'un bouquin d'humour que d'un recueil de photos du monde agricole contemporain, ce qu'il est pourtant. Les photos ont été piochées ou moissonnées dans les banques d'images, et surtout dotées de légendes malicieuses et décalées, ce qui fait tout leur sel. 

Bien ri à feuilleter ces histoires drôles illustrées et blagounettes photographiques, on ne sait qui a commencé, l'oeuf ou la poule, l'idée du dialogue saugrenu et de la blague à deux choux d'abord, à plaquer sur les scènes présentées au hasard des photos, ou bien certaines photos elles-mêmes, qui par leur côté posé ou Angélus de Millet numérique, imposaient un recadrage avec ces légendes fort mal à propos ? 

Bonne lecture d'après Noël, histoire de se remettre de la dinde, ou plutôt de la frustration d'icelle, car dans notre cas ce fut choucroute obligatoire pour Noël, dans cette famille de consanguins alsaciens (ne suis qu'une pièce rapportée). Le chou vert de la couverture de livre dès lors me tendait ses petits bras, toutes bonnes feuilles dehors (210 pages), reliure bien fraîche et reluisante. Car méchante prise de chou(x) aussi chez nous il y eut à Noël, grosses disputes autour d'un menu  de réveillon mal digéré, il y a les amateurs de volaille consacrée et les amateurs de choucroute, et pourtant j'aime cette dernière préparation saumurée d'habitude, mais là trop c'est trop, promis j'arrête le jarret. Y'aura-t-il de la dinde à Noël l'an prochain, tel est le débat qui énerve, dans la célèbre brasserie alsacienne de la place de la République on risque bien de devoir continuer à se fader du chou (prrrrt) tous les 25 décembre, à moins de recourir au divorce ou d'espérer la fin du monde, mais pour l'apocalypse désormais tintin. Or une bonne dinde bien grillée et rôtie avec ses marrons, sur une table décorée, ça se fait en cette période de l'année où Santa Claus is coming back in town non ? Bon passons, j'irais chez Picard et je l'aurais ma dinde, je l'aurais.

Allons plutôt chercher les dindes et les poulets et les coqs, et les cochons aussi, sur les photos de "Prises de choux", le très drôle ouvrage paru dans la nouvelle collection Spam des éditions Kiro. Les autres auteurs de la collection sont Laurent Baffie, Philippe Vandel et autres trublions, y'aurait-il un esprit Canal pluche qui flotte sur cette série. Avec en prime pour "Prises de choux", tout le talent donc du rédacteur-concepteur Jean-Christophe Royer (et non pas Jean-Michel - à-peu-près -, comme rebaptisé par moi dans le premier titre de ce post, voir son commentaire un peu sec), et ça donne ça sur sa page facebook.

Sont pleines d'humour ces photos avec dialogues paysans saugrenus et décalés, un peu comme le truc des animaux filmés que fait parler, qui donc déjà, le type qui jouait le curé chantant dans "La vie est un long fleuve tranquille", Patrick Bouchitey, cet esprit là avec des dialogues écrits entre les protagonistes, du monde paysan. Y voir un message politique contre la mondialisation bordel, c'est ce que l'auteur nous indique dans l'introduction, ou aussi et c'est pas si peu une bonne tranche de lard de rire gras, bien senti, dialogues au petit crin, c'est chou gras et bien ficelé, normal le monsieur fait de la pub. Pas chou blanc en tout cas, je veux le livre même si Papa Noël est passé et qu'il m'a amené les 2 premiers tomes de "1Q84" que j'avais déjà lus et pas spécialement aimé, voir ici. Le généreux donateur a décidé finalement de les garder pour louis lui, d'ailleurs j'avais bien failli les lui offrir moi même, meilleures ventes obligent ; dans le même genre il a échappé aux "50 nuances de grey", heureusement après en avoir lu deux lignes atroces, du genre "Haletante de désir, ses seins se tendirent vers lui" et autres conneries, j'ai vite reposé le pavé en équilibre sur sa pile de 200 exemplaires. Notons bien que ce même genre de dialogue érotico-pourri dans la bouche de deux campagnards geek, en train de lire ensemble une liseuse ou tablette numérique dans les champs, sur fond de coucher de soleil (alors que plus vraisemblablement ils sont en train de consulter le cadastre ou le plan d'assolement), eh bien ça fait  rire quand c'est écrit par Jean-Christophe Royer. Sans nuances de grey mais avec du bon rire qui tâche, gaffe à la bouse, on ne peut rester insensible à la drôlerie irrésistible des situations détournées, y'a "Rififoin dans les labours", du nom de cette vieille pièce de café-théâtre vue et revue, en plus marrant, second ou soixante-quinzième degré obligatoire.

Même si peut-être quand même un peu un livre estampillé "humour paysan", surtout destiné aux Parisiens en mal de boue sous leurs chaussures qui ne retournent pas souvent dans leur Loir-et-Cher. Je marche moi-même toute l'année sur le bitume et l'herbe et la gadoue me manquent, alors  j'assume, d'autant que des paysans, des agriculteurs, des choux et des vaches, veaux, cochons, couvée, on n'en voit pas si souvent dans les bouquins de photos ; les sujets urbains et les nus, pour ne citer que ces deux genres, étant autrement plus exploités. On est loin certes de la "Vie moderne" et des "Profils paysans" de Raymond Depardon, mais ça ne se veut pas si moqueur que ça, toutes ces jokes rendent aussi justice à la terre et ses produits qui nous font vivre, aux gens qui la travaillent, et surtout aux animaux, auxquels il est "humain" de donner la parole, pour contrebalancer, ou dénoncer l'enfer de leur exploitation industrielle et mondialisante, et oui c'est peut-être bien un livre politique. 

 

Regrette bien de ne pouvoir ici montrer les visuels car présentement "configurer les documents" et "ajouter des photos" ça bugue sur Overblog, je ne peux que renvoyer à la page Facebook, des milliers de like, ces prises de choux sont archi-connues déjà en fait sur le net, on y trouve plein de nouvelles photos par rapport au livre imprimé, rires garantis. Tiens, je pourrais peut-être en décrire quelques unes :

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Des cochons en train de vaquer, et deux types derrière eux, un père et un ado qui échangent ce dialogue :

- Comment ça, "Grouïck !" ?

- Mais c'est pas moi ! 

- Qu'est ce que tu entends exactement par "Grouïck" ?

- Mais c'est pas moi, j'te dis !!!

-C'est contre moi ?

-C'est pas moi, merde !!!

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 Un blond à bonne tête germanique, paysan ou chef d'exploitation agricole, dans les champs de salades ou de choux, pensif, un chou pommé à la main. De la bande de ramasseurs au loin fuse : 

- Eh, Hamlet ! Tu viens manger ?

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Une jolie blonde assise sur un pot au lait, un peu penchée, robe fleurie sur jean et bottes, souriante même si comme dérangée en pleine grosse commission. Hors champ, légende :

- Ho, pardon !

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Deux mecs munis de gants, plantés les pieds dans un entrepot de patates, de la bintje jusqu'au plafond ou presque, chacun deux patates en main, rigoureusement semblables aux milliers d'autres qui submergent l'image. Les mecs :

- Ah merde ! Encore bataille !

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Une cane blanche dans l'herbe, avec une dizaine de canetons derrière elle :

- Mais vous allez arrêter de me suivre ?

- Sans déconner, il va falloir penser à vous forger une vraie personnalité, merde. Z'êtes pas des moutons.

- Et si je décide de sauter du haut d'une falaise, vous le faites aussi, bande de cons ?

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Un paysan découpe au couteau le poitrail sanglant d'une vache (morte, heureusement), toutes viscères à l'air, les 4 fers en l'air ou ce qu'il en reste, les moignons des pattes de devant (ça se mange, les pattes ??), le tout sur une belle herbe vert tendre : 

- J'aurais dû apporter un sandwich, mais tant pis, j'ai trop faim ! 

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Un jeune homme tient délicatement un oeuf entre le pouce et l'index d'une main, et de l'autre un volatile emplumé qui n'est pas une poule :

- Regardez, je vais remettre cet oeuf dans cette poule, sans le casser.

- Chuis un coq, bordel, un coq !!! dit l'autre

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Aah enfin des visuels, ça marche, j'arrive à illustrer ce post ! Bien le moins pour un billet faisant l'éloge d'un livre de photographies... Sur Internet Explorer, on peut copier les images du web, tandis que sur Mozilla le renard rusé, ma cache. Alors, voyez comme c'est bien, celle-ci de saison tintinnabulante car c'est Noël, et plus bas, des oeufs qui parlent de leurs vacances !  

  Finalement le chou et le porc à Noël, j'aime bien !!! 

 

 

Publié dans petits bonheurs

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J
<br /> Jean-Christophe, pas Jean-Michel. Merci.<br />
Répondre
L
<br /> <br /> Erreur réparée, vous n'êtes pas Jean-Christophe-à-peu-près !<br /> <br /> <br /> <br />